Ma nouvelle EROTIQUE : AU COEUR D'ELLE
--> Ecrit protégé, bas les pattes!
Je me souviens encore de ces parfums sucrés dans l’air chaud, de ces monts frissonnants, de ces vallées douces sous les lumières fragiles d’un matin vierge. J’ai frôlé du bout des doigts, senti son cœur rugissant et parcouru ce pays sans jamais m’en lasser…
J’entrepris un jour de me lancer dans ce périple, fin chasseur sur des terres inconnues à ce jour mais dont j’avais déjà rapporté mille gibiers aux oreilles de tous. Je leur montrerai que j’étais devenu bel et bien cet homme, capable de parcourir sans carte, d’apprendre de la vie, de franchir seul tout ce monde se présentant à moi. Je serai le conquérant, comme un certain Alexandre le fut avant moi, en d’autres temps, en d’autres contrées, et pour eux, un voyageur qui confirme simplement ses découvertes. J’étais gonflé de fierté et de candeur, de naïveté et de force. Mon parcours initiatique à l’insu de tous pouvait commencer avec un peu de fébrilité dans l’air, j’avoue.
Depuis fort longtemps, elle m’accompagnait dans mes tourments, de cœur et de corps, la jolie Coralie. Nous nous connaissions sans doute depuis le jour où nous étions venus au monde : je ne voyais qu’elle. A présent, ses cheveux coulaient dans son dos et chuchotaient à ses hanches des choses que je ne n’osais pas découvrir. Mon œil en brille encore, quand je la voyais me rejoindre juste au coucher du soleil, avec ce pas rapide qui faisait claquer ses souliers d’adolescente sur les pavés d’un chemin. Je la dévorais des yeux, elle ne le savait que trop bien. J’avais avec elle cet air d’homme d’expérience, l’œil fonceur, prêt à désarçonner n’importe quelle amazone. Elle aimait ça.
Quand nous entreprîmes de voyager ensemble, elle hésita un moment. Je n’en fus qu’un peu surpris : elle était encore jeune, dix-huit ans tout juste avec une frimousse qui aurait trompé plus d’un état civil. Elle savait que je la voulais, elle, à mes côtés pour cette chasse là. Et farouche comme elle était, il me fallut plus d’un argument pour la convaincre de me suivre.
Un jour pourtant, elle se décida, dit « oui » d’un air de fine guerrière. Je la crus, nous partîmes sans plus de questions. Au soir même, avec peu sur le dos, nous suivîmes un lit, ma main dans la sienne.
Je parcourus alors ce torrent fou, mes doigts s’y perdaient parfois. Tout coulait avec légèreté, mon regard s’oubliait dans des nœuds d’ondes que mes mains laissaient derrière elles J’embrassais avec fouge ce front clair qui se présenta à moi au détour d’un instant d’égarement. Parfois, Coralie me regardait et souriait face à ma peur de mal faire. Je répondais sans rien dire, lui laissant un baiser sur sa joue ronde comme pour lui montrer mon assurance face à l’inconnu, puis me permettais de continuer mon chemin. Elle me suivit. Donc oui, cette rivière, ou ce fleuve… à vrai dire je ne sais plus trop ! Tout est fluide dans ma mémoire, tout en fraîcheur.
Apparut un pic, petit mais droit. Des vents s’y engouffraient délicatement, comme une brise à mon arrivée, en bourrasques plus tard dans la soirée. Sans doute le ciel avait il son importance dans ces états de nature. Ce petit sommet triomphait de deux délicates rondeurs de part et d’autre. Un peu plus haut, j’avais passé deux petites étendues miroitantes entourées de joncs noirs, mais je n’eu pas le plaisir d’y apercevoir même mon ombre. Je les avais quittées un peu déçu mais d’autant plus décidé d’y revenir plus tard.
Au pied de ma première hauteur, ma première merveille, mon premier abandon, ma première adoration… On m’avait parlé de cette gorge, percée des âmes, ouverture sur un monde profond et inconnu, sourd et rugissant. Deux talus la bordaient tout le long, gonflés, charnus. On entendait comme une haleine fragile, on la sentait disparaître tout au fond. Il y faisait sombre dans une chaleur moite. Personne n’était allée dans celle là, terrain vierge et pourtant offert à mes explorations nocturnes. J’embrassais ce décor, me délectait de son mystère…
« Mic ?
- Oui, Coralie… ? »
Ses grands yeux noirs me faisaient face, elle souriait avec un air gourmand pendu aux lèvres.
« Où va t on ? »
« Tout au fond »
Elle hésita, me regarda un moment, et dans une confiance dont elle ne trouva pas l’explication dans l’instant, revint près de moi.
J’entrepris d’explorer, le cœur battant, la fente vibrante, lugubre et chaude. Une source y sommeillait sûrement vu les liqueurs bouillantes qui pouvaient surgir sans prévenir. Quelque chose me caressa un flanc, j’en frissonnai, me retirai, la peur au ventre et ne la montrai pas à Coralie. J’étais bien trop fier. Cependant, que pouvait donc se cacher tout au fond ? Aurai je le courage et la ferveur de le combattre ? Je m’attardai à la rondeur de ces berges tremblantes, faute de savoir comment m’y prendre avec le « monstre ».
« Mic ?
- Oui, Coralie… ?
- … »
Elle ne put m’en dire plus. Elle se tut soudain. Je continuai mon chemin. Sans doute avait elle senti ma peur et mon émoi de maladroit. Et puis, pourquoi reculer ? J’embrassai le monstre, le liai, le pinçai, le mordis presque pour le voir rendre l’âme. Son cœur mou pressait le mien, tant de fluides s’échangèrent. Essoufflé, il disparut dans l’antre. Je sortis vainqueur de ce combat, Coralie n’en revenait pas. J’étais heureux de la voir avec ce regard pleins d’égards qu’elle posait sur moi.
Je repartis satisfait , m’attardant longuement sur un sentier accidenté, aux lignes droites défiant l’horizon. Au loin, un désert m’attendait. Je sentais déjà le parfum de ces dunes rondes et conquérantes. Elles se dressaient là comme un affront, et moi, j’étais fort de ma première victoire. Leur couleur dorée accueillait parfois les reflets de la lune lointaine. L’œil de nuit aurait il eu peur de tourner fou face à ces sommets qui le frôlaient presque par vent frais ? Peut-être. Toujours est il que ce soir là, je ne vis pas la lune dans toute sa splendeur mais plutôt ces soupirs glacés qu’elle craignait tant. C’était sans doute un présage pour de prochaines batailles.
Une bourrasque m’aspira tout en haut d’une première dune. Un caillou y triomphait. Il était dur, posé là depuis sans doute la nuit des temps : rien ne semblait l’avoir fait décoller de son socle depuis toutes ces nuits. Tout, sauf mes doigts. Je me penchai vers lui, le fis rouler entre mon pouce et mon index. Soudain, la dune trembla, frissonna. Le vent ?
« Mic ?
- Oui, Coralie ? »
Elle avait eu peine à me suivre jusque là. Je trottais si vite et elle qui avançait chaque fois à petits pas. Elle était rouge, sans doute énervée par mon empressement, rosée sur les joues, haletante.
« Attends… »
Mais peine perdue, j’étais déjà ailleurs même si elle me retint par le bras. Je l’écartai, me libérai, et continuai sur ma lancée.
En moi, je pensais : « Je voudrais bien ma Coralie mais j’ai tant de choses à voir, tant de choses à vivre. Suis moi comme tu peux, regarde moi de loin si tu veux : nous devons rentrer pour demain et je n’y arriverai pas si tu te plais à me rappeler près de toi à tout instant… » Je riais intérieurement, fougueux, pleins d’envies folles, sachant bien que je gagnerai tout attaque se présentant à moi.
Je redescendis de ma dune, parcourus les flans de la seconde, et étrangement, un autre caillou siégeait aussi sur son mont doré. Là aussi, je le fis rouler dans ma main de même manière que le premier, et là encore, curieusement, tout retrembla de nouveau. Je pris le temps de palper, tâter, étirer, goûter tout ce qui la constituait, cette chère cime délicieuse… cela ne faisait que la faire trembler d’avantage. Intrigué, j’entrepris de descendre en toute confiance, fort de ma découverte et de mon pouvoir sur cet univers nouveau.
Au pied de ces monts, l’horizon semblait droit et sans surprise. Une chaleur se faisait sentir malgré l’heure tardive. J’avançais à tâtons puisque l’inconstant et pâle sceau lunaire me fuyait et n’était pas bien généreux de ses lumières. Alors ma peau touchait toute cette plaine finement ciselée par le silence de ce Sahara miniature. Coralie était encore là mais sans doute déjà à quelques pas de moi. Elle ne m’appelait plus, ne me cherchait plus. Malgré cela je l’entendais respirer. L’obscurité ne me laissait pas entrevoir son visage mais parfois ses cheveux crissaient comme quand elle les noue en chignon triomphant sur le haut de sa tête. Alors je ne m’inquiétais plus et repartais de plus belle, la plus jolie fille sur mes traces.
Un puits jaillit, je tombai presque le nez dedans. Il n’était pas bien profond, on ne l’attendait pas au milieu de cette plaine. Certes une oasis semblait se décrire au loin mais lui, ici… j’en fus longuement surpris. Sans doute était il là depuis la naissance de ce néant délicieux, sinon pas moins longtemps. Il était vide et sec, mais rond et toujours creux.
Je ne pus m’y rassasier, la faim me prenait peu à peu. J’avais comme des nœuds dans l’estomac, mon cœur grondait de tous ces efforts de jeune homme que j’étais. Je soufflais fort, Coralie aussi. Des perles de sueur courraient doucement sur mes joues et mes yeux me brûlaient. Le massif touffu là bas me ferait sans doute bon accueil. Je le rejoignis avec empressement, Coralie semblait essoufflée. Elle aussi se reposerait là bas.
Je m’arrêtai au pied des premiers buissons, posai ma tête contre le sol, m’allongeai tout le long. La fatigue fit danser ma main droite sur les racines des jeunes pousses. Je fermai les yeux sans succomber au chant de lune. Je sentais ce que mes doigts parcouraient. Le fourré frissonnait, sans doute toujours à cause de ce vent du soir. L’herbe était sèche, d’un blond ambré peut être, et faisait comme un chant de satin. Je faisais des nœuds avec, la tournait autour de mes phalanges : j’étais presque coiffeur, à faire des bigoudis sur la tête d’une lady.
Puis, je m’ennuyais de ce jeu solitaire, entrepris d’aller plus loin sans pourtant bouger plus. Mon bras s’allongea, mes doigts se tendirent, tout mon corps aussi d’ailleurs. Le terrain se faisait plus mou, annonçant sans doute une source. J’hésitai longuement avant de me lancer dans ce milieu mais j’étais mordu par la soif. Je ne connaissais rien de pareil comme lieu, on ne m’en avait jamais parler.
D’ailleurs, pourquoi ? Etait ce un lieu dangereux où les hommes s’y perdaient et dont ils ne revenaient jamais, à moins d’une force de volonté sans pareil ? S’y noyaient ils ? Une chimère y vivait elle ? Un frisson me parcourut. Serai je de ces hommes qui affrontent l’inconnu avec vaillance et courage ? Après tout, la vie attendait de moi que je devienne un homme. Qu’avais je donc à perdre de ce combat ? Au plus, mes illusions de garçon quant à une vie sans conflit, sans trahison, sans lutte pour survivre, tout ça s’envolerait bien un jour comme celui-là ou un autre. Je ne me faisais guère d’illusion. Alors, rassemblant ce qui me faisait office d’orgueil et de bravoure, j’entrepris de découvrir, enfin, ce lieu étrange.
La main de Coralie vint se poser sur ma joue brûlante. Elle caressait mes cheveux sans rien dire, m’encourageait comme elle le pouvait tout en me freinant de ses peurs. Elle était près de moi, je la sentais droite et fière, le corps raidi. Elle avait toujours été là depuis toute ma vie. Elle me donnait de sa force en me touchant droit au cœur par ses mots, ses gentillesses, parfois ses coups de sang. Là encore, je puisais ma force en son sein, l’embrassant chastement tout en dévorant d’envies folles sa chair en un regard. Ô Coralie, ma douce Coralie ! Tu sais que je t’aime tant. Et toi tu joues la surprise de tels sentiments.
Du bout des doigts toujours, je me glissai comme dans des couvertures gorgées d’eau. Tout y était liquide. Des plis et replis comme de chair brûlante tapissaient, tout le paysage de ce lieu extraordinaire. J’hésitai longuement avant d’aller plus loin, ne présageant pas forcément une suite douce comme cet endroit.
Toutes mes craintes s’envolèrent quand je sentis comme un bouton de rose, une fleur aux pétales bien serrés. Coralie sursauta de ma découverte. Je la rassurai d’un sourire, l’œil brillant, serrant sa main qui bloquait ma quête. Le bourgeon était de même texture, même matière que les plis qui l’encerclaient et la protégeait. Il pointait au milieu de tout ça, attendant une caresse. Un peu d’eau mouillait ses corolles, ça n’en rendit que mon étreinte plus facile et plus douce. D’abord, je tournai autour, toujours sans la voir, paisiblement puis plus vite. La fleur grandissait dans mes efforts de bien faire, elle se redressait petit à petit au fur et à mesure que la frénésie m’envahissait.
Coralie fut alors comme prise de peur à mon égard, rappela ma raison à l’ordre pour ne pas succomber à ce danger qui me guettait. Ses doigts serrèrent ma joue, comme crispés. J’ouvris les yeux, retirai ma main de son écrin captivant, elle poussa un soupir.
« Mic, doucement…
- Oui, je sais… J’y retourne
- Non »
« Mais si, ma douce, je m’en retourne de ce pas » pensai je sans lui dire. J’écartai ses doigts loin de moi, repoussant son second affront, la maintenant à sa place de temps de mon périple.
Ma seconde marche repassa près du bouton. Je pris sur moi pour ne pas le rejoindre comme dans notre dernière course folle. C’était un peu de ses rondes de nymphes que Dionysos saoule de musique et de vins pour les voir perdre la raison. Il me fallut être fort et raisonnable pour ne pas succomber à cette ivresse.
Mon chemin continua donc vers l’inconnu. J’écartai les plis pesants et chaud, croisa une fente. J’estimai sa longueur en avançant un peu plus le bras. Pour l’instant, elle semblait calme mais j’eus comme le pressentiment que quelque chose allait se passer. Deux plis plus minces cachaient l’entrée de ce monde miniature, du bout des doigts, encore et toujours. L’air ambiant semblait chaud et parfumé, lourd et chargé d’arômes. J’entrepris de ne plus y aller en aveugle : rien ne semblait dangereux dans cet univers apparemment hostile mais si accueillant malgré tout. Mon visage caressa les premiers fourrés, je ressentis la rose m’appeler. Je la vis enfin. Elle était d’un rouge sanguin, brillante et semblait délicieuse. Je la frôlai de ma bouche, elle eut un premier sursaut, je la caressai du bout de ma langue pour la goûter. Et la danse reprit comme la première fois de notre dernière rencontre…
Coralie serrait mes cheveux entre ses doigts, haletait sans réserve, rugissait presque d’un plaisir certain. Ses cuisses s’ouvraient sur mon passage, la fente m’attendait, rougeoyante et impatiente. Je déployais tout mon vocabulaire pour satisfaire ce pays de plaisir et de sensualité, en coup de litotes et de synonymes divins. Mes mains serraient ses cuisses pour ne pas être prisonnier de cet étau de sensualité. Elles s’ouvraient à mes avances sans trop de résistance. Je parcourai sa féminité de long en large, à coups de langue, à laper tous ces sucs qui venaient à ma bouche… J’enfonçai doucement un doigt dans le précipice qui s’offrait à moi. Il y glissait sans à-coup. Les parois tièdes l’entouraient, l’accompagnaient dans son exploration profonde. Mais je voyais bien que tout ça ne suffisait pas.
Alors de toute ma fierté de mâle de mon espèce, le membre tendu et conquérant, je me présentai à l’entrée toute tremblante. Je n’eus pas à forcer, les portes quittèrent leur scellé de virginité dans un mouvement naturel et tant désiré. Une goutte de sang tacha ton innocence, belle Coralie.
Elle pressait ma chair, tendait ses pieds jusqu’à la plante, accueillait ma fougue en petits cris sifflants entre ses dents parfois serrées. Elle caressait tout mon dos, griffait mon torse, emprisonna mes hanches de ses bras, me fit danser au rythme de son cœur battant. Je l’embrassai, la léchai de tout son long, revenant à son ventre, ses seins, sa gorge, ses lèvres, ses yeux.
Ouverts mais ailleurs, j’aperçus ce bleu profond qui flottait au milieu d’une pupille dilatée. Elle regardait dans le vague, je ne saurai l’y joindre, je ne croisais jamais son regard. J’aurai pourtant tant voulu savoir tout ce qui la bouleversait à cet instant. Ces cils vacillaient à mes coups de reins, son souffle rythmait nos ébats de jeunes premiers.
Encore. Encore. Encore et toujours. J’allais, venais, allais, venais, encore et encore. Une fièvre montait en moi, plus brûlante que celle de l’absinthe, plus incontrôlable qu’une transe de cigarette aux herbes fantomatiques. Je la sentais laisser sa trace de mon cœur à plus bas, toujours plus bas, consumant mes veines, immolant mon être. Arrivée à tout ce qui me faisait homme, ce plaisir incandescent voulut jaillir hors de moi. Je ne pus le retenir. Un râle accompagna ma délivrance, Coralie poussa un murmure ligoté d’autant de fougue.
Je ne pus tenir plus longtemps et m’allongea près d’elle, tremblante. Je voyais son ventre se lever à chacune de ses respirations, ses seins fermes et fiers se dresser face au ciel. Ma tête se lova près de son cœur, mon oreille sur sa peau, et mon corps tout le long du sien. De ma main droite, je la frôlai doucement. Mes paupières trop lourdes se refermèrent sur ce trésor, sur mon amour. Le sommeil m’étourdit un instant, je tirai la couverture qui n’avait pas survécu à nos ébats et qui s’était cachée à nos pieds. Elle s’endormit avec moi, paisiblement. Je ne pensais pas que les plus beaux trésors pouvaient être si près et si bien cachés. Le matin arriva en délivrance.
J’entrepris un jour de me lancer dans ce périple, fin chasseur sur des terres inconnues à ce jour mais dont j’avais déjà rapporté mille gibiers aux oreilles de tous. Je leur montrerai que j’étais devenu bel et bien cet homme, capable de parcourir sans carte, d’apprendre de la vie, de franchir seul tout ce monde se présentant à moi. Je serai le conquérant, comme un certain Alexandre le fut avant moi, en d’autres temps, en d’autres contrées, et pour eux, un voyageur qui confirme simplement ses découvertes. J’étais gonflé de fierté et de candeur, de naïveté et de force. Mon parcours initiatique à l’insu de tous pouvait commencer avec un peu de fébrilité dans l’air, j’avoue.
Depuis fort longtemps, elle m’accompagnait dans mes tourments, de cœur et de corps, la jolie Coralie. Nous nous connaissions sans doute depuis le jour où nous étions venus au monde : je ne voyais qu’elle. A présent, ses cheveux coulaient dans son dos et chuchotaient à ses hanches des choses que je ne n’osais pas découvrir. Mon œil en brille encore, quand je la voyais me rejoindre juste au coucher du soleil, avec ce pas rapide qui faisait claquer ses souliers d’adolescente sur les pavés d’un chemin. Je la dévorais des yeux, elle ne le savait que trop bien. J’avais avec elle cet air d’homme d’expérience, l’œil fonceur, prêt à désarçonner n’importe quelle amazone. Elle aimait ça.
Quand nous entreprîmes de voyager ensemble, elle hésita un moment. Je n’en fus qu’un peu surpris : elle était encore jeune, dix-huit ans tout juste avec une frimousse qui aurait trompé plus d’un état civil. Elle savait que je la voulais, elle, à mes côtés pour cette chasse là. Et farouche comme elle était, il me fallut plus d’un argument pour la convaincre de me suivre.
Un jour pourtant, elle se décida, dit « oui » d’un air de fine guerrière. Je la crus, nous partîmes sans plus de questions. Au soir même, avec peu sur le dos, nous suivîmes un lit, ma main dans la sienne.
Je parcourus alors ce torrent fou, mes doigts s’y perdaient parfois. Tout coulait avec légèreté, mon regard s’oubliait dans des nœuds d’ondes que mes mains laissaient derrière elles J’embrassais avec fouge ce front clair qui se présenta à moi au détour d’un instant d’égarement. Parfois, Coralie me regardait et souriait face à ma peur de mal faire. Je répondais sans rien dire, lui laissant un baiser sur sa joue ronde comme pour lui montrer mon assurance face à l’inconnu, puis me permettais de continuer mon chemin. Elle me suivit. Donc oui, cette rivière, ou ce fleuve… à vrai dire je ne sais plus trop ! Tout est fluide dans ma mémoire, tout en fraîcheur.
Apparut un pic, petit mais droit. Des vents s’y engouffraient délicatement, comme une brise à mon arrivée, en bourrasques plus tard dans la soirée. Sans doute le ciel avait il son importance dans ces états de nature. Ce petit sommet triomphait de deux délicates rondeurs de part et d’autre. Un peu plus haut, j’avais passé deux petites étendues miroitantes entourées de joncs noirs, mais je n’eu pas le plaisir d’y apercevoir même mon ombre. Je les avais quittées un peu déçu mais d’autant plus décidé d’y revenir plus tard.
Au pied de ma première hauteur, ma première merveille, mon premier abandon, ma première adoration… On m’avait parlé de cette gorge, percée des âmes, ouverture sur un monde profond et inconnu, sourd et rugissant. Deux talus la bordaient tout le long, gonflés, charnus. On entendait comme une haleine fragile, on la sentait disparaître tout au fond. Il y faisait sombre dans une chaleur moite. Personne n’était allée dans celle là, terrain vierge et pourtant offert à mes explorations nocturnes. J’embrassais ce décor, me délectait de son mystère…
« Mic ?
- Oui, Coralie… ? »
Ses grands yeux noirs me faisaient face, elle souriait avec un air gourmand pendu aux lèvres.
« Où va t on ? »
« Tout au fond »
Elle hésita, me regarda un moment, et dans une confiance dont elle ne trouva pas l’explication dans l’instant, revint près de moi.
J’entrepris d’explorer, le cœur battant, la fente vibrante, lugubre et chaude. Une source y sommeillait sûrement vu les liqueurs bouillantes qui pouvaient surgir sans prévenir. Quelque chose me caressa un flanc, j’en frissonnai, me retirai, la peur au ventre et ne la montrai pas à Coralie. J’étais bien trop fier. Cependant, que pouvait donc se cacher tout au fond ? Aurai je le courage et la ferveur de le combattre ? Je m’attardai à la rondeur de ces berges tremblantes, faute de savoir comment m’y prendre avec le « monstre ».
« Mic ?
- Oui, Coralie… ?
- … »
Elle ne put m’en dire plus. Elle se tut soudain. Je continuai mon chemin. Sans doute avait elle senti ma peur et mon émoi de maladroit. Et puis, pourquoi reculer ? J’embrassai le monstre, le liai, le pinçai, le mordis presque pour le voir rendre l’âme. Son cœur mou pressait le mien, tant de fluides s’échangèrent. Essoufflé, il disparut dans l’antre. Je sortis vainqueur de ce combat, Coralie n’en revenait pas. J’étais heureux de la voir avec ce regard pleins d’égards qu’elle posait sur moi.
Je repartis satisfait , m’attardant longuement sur un sentier accidenté, aux lignes droites défiant l’horizon. Au loin, un désert m’attendait. Je sentais déjà le parfum de ces dunes rondes et conquérantes. Elles se dressaient là comme un affront, et moi, j’étais fort de ma première victoire. Leur couleur dorée accueillait parfois les reflets de la lune lointaine. L’œil de nuit aurait il eu peur de tourner fou face à ces sommets qui le frôlaient presque par vent frais ? Peut-être. Toujours est il que ce soir là, je ne vis pas la lune dans toute sa splendeur mais plutôt ces soupirs glacés qu’elle craignait tant. C’était sans doute un présage pour de prochaines batailles.
Une bourrasque m’aspira tout en haut d’une première dune. Un caillou y triomphait. Il était dur, posé là depuis sans doute la nuit des temps : rien ne semblait l’avoir fait décoller de son socle depuis toutes ces nuits. Tout, sauf mes doigts. Je me penchai vers lui, le fis rouler entre mon pouce et mon index. Soudain, la dune trembla, frissonna. Le vent ?
« Mic ?
- Oui, Coralie ? »
Elle avait eu peine à me suivre jusque là. Je trottais si vite et elle qui avançait chaque fois à petits pas. Elle était rouge, sans doute énervée par mon empressement, rosée sur les joues, haletante.
« Attends… »
Mais peine perdue, j’étais déjà ailleurs même si elle me retint par le bras. Je l’écartai, me libérai, et continuai sur ma lancée.
En moi, je pensais : « Je voudrais bien ma Coralie mais j’ai tant de choses à voir, tant de choses à vivre. Suis moi comme tu peux, regarde moi de loin si tu veux : nous devons rentrer pour demain et je n’y arriverai pas si tu te plais à me rappeler près de toi à tout instant… » Je riais intérieurement, fougueux, pleins d’envies folles, sachant bien que je gagnerai tout attaque se présentant à moi.
Je redescendis de ma dune, parcourus les flans de la seconde, et étrangement, un autre caillou siégeait aussi sur son mont doré. Là aussi, je le fis rouler dans ma main de même manière que le premier, et là encore, curieusement, tout retrembla de nouveau. Je pris le temps de palper, tâter, étirer, goûter tout ce qui la constituait, cette chère cime délicieuse… cela ne faisait que la faire trembler d’avantage. Intrigué, j’entrepris de descendre en toute confiance, fort de ma découverte et de mon pouvoir sur cet univers nouveau.
Au pied de ces monts, l’horizon semblait droit et sans surprise. Une chaleur se faisait sentir malgré l’heure tardive. J’avançais à tâtons puisque l’inconstant et pâle sceau lunaire me fuyait et n’était pas bien généreux de ses lumières. Alors ma peau touchait toute cette plaine finement ciselée par le silence de ce Sahara miniature. Coralie était encore là mais sans doute déjà à quelques pas de moi. Elle ne m’appelait plus, ne me cherchait plus. Malgré cela je l’entendais respirer. L’obscurité ne me laissait pas entrevoir son visage mais parfois ses cheveux crissaient comme quand elle les noue en chignon triomphant sur le haut de sa tête. Alors je ne m’inquiétais plus et repartais de plus belle, la plus jolie fille sur mes traces.
Un puits jaillit, je tombai presque le nez dedans. Il n’était pas bien profond, on ne l’attendait pas au milieu de cette plaine. Certes une oasis semblait se décrire au loin mais lui, ici… j’en fus longuement surpris. Sans doute était il là depuis la naissance de ce néant délicieux, sinon pas moins longtemps. Il était vide et sec, mais rond et toujours creux.
Je ne pus m’y rassasier, la faim me prenait peu à peu. J’avais comme des nœuds dans l’estomac, mon cœur grondait de tous ces efforts de jeune homme que j’étais. Je soufflais fort, Coralie aussi. Des perles de sueur courraient doucement sur mes joues et mes yeux me brûlaient. Le massif touffu là bas me ferait sans doute bon accueil. Je le rejoignis avec empressement, Coralie semblait essoufflée. Elle aussi se reposerait là bas.
Je m’arrêtai au pied des premiers buissons, posai ma tête contre le sol, m’allongeai tout le long. La fatigue fit danser ma main droite sur les racines des jeunes pousses. Je fermai les yeux sans succomber au chant de lune. Je sentais ce que mes doigts parcouraient. Le fourré frissonnait, sans doute toujours à cause de ce vent du soir. L’herbe était sèche, d’un blond ambré peut être, et faisait comme un chant de satin. Je faisais des nœuds avec, la tournait autour de mes phalanges : j’étais presque coiffeur, à faire des bigoudis sur la tête d’une lady.
Puis, je m’ennuyais de ce jeu solitaire, entrepris d’aller plus loin sans pourtant bouger plus. Mon bras s’allongea, mes doigts se tendirent, tout mon corps aussi d’ailleurs. Le terrain se faisait plus mou, annonçant sans doute une source. J’hésitai longuement avant de me lancer dans ce milieu mais j’étais mordu par la soif. Je ne connaissais rien de pareil comme lieu, on ne m’en avait jamais parler.
D’ailleurs, pourquoi ? Etait ce un lieu dangereux où les hommes s’y perdaient et dont ils ne revenaient jamais, à moins d’une force de volonté sans pareil ? S’y noyaient ils ? Une chimère y vivait elle ? Un frisson me parcourut. Serai je de ces hommes qui affrontent l’inconnu avec vaillance et courage ? Après tout, la vie attendait de moi que je devienne un homme. Qu’avais je donc à perdre de ce combat ? Au plus, mes illusions de garçon quant à une vie sans conflit, sans trahison, sans lutte pour survivre, tout ça s’envolerait bien un jour comme celui-là ou un autre. Je ne me faisais guère d’illusion. Alors, rassemblant ce qui me faisait office d’orgueil et de bravoure, j’entrepris de découvrir, enfin, ce lieu étrange.
La main de Coralie vint se poser sur ma joue brûlante. Elle caressait mes cheveux sans rien dire, m’encourageait comme elle le pouvait tout en me freinant de ses peurs. Elle était près de moi, je la sentais droite et fière, le corps raidi. Elle avait toujours été là depuis toute ma vie. Elle me donnait de sa force en me touchant droit au cœur par ses mots, ses gentillesses, parfois ses coups de sang. Là encore, je puisais ma force en son sein, l’embrassant chastement tout en dévorant d’envies folles sa chair en un regard. Ô Coralie, ma douce Coralie ! Tu sais que je t’aime tant. Et toi tu joues la surprise de tels sentiments.
Du bout des doigts toujours, je me glissai comme dans des couvertures gorgées d’eau. Tout y était liquide. Des plis et replis comme de chair brûlante tapissaient, tout le paysage de ce lieu extraordinaire. J’hésitai longuement avant d’aller plus loin, ne présageant pas forcément une suite douce comme cet endroit.
Toutes mes craintes s’envolèrent quand je sentis comme un bouton de rose, une fleur aux pétales bien serrés. Coralie sursauta de ma découverte. Je la rassurai d’un sourire, l’œil brillant, serrant sa main qui bloquait ma quête. Le bourgeon était de même texture, même matière que les plis qui l’encerclaient et la protégeait. Il pointait au milieu de tout ça, attendant une caresse. Un peu d’eau mouillait ses corolles, ça n’en rendit que mon étreinte plus facile et plus douce. D’abord, je tournai autour, toujours sans la voir, paisiblement puis plus vite. La fleur grandissait dans mes efforts de bien faire, elle se redressait petit à petit au fur et à mesure que la frénésie m’envahissait.
Coralie fut alors comme prise de peur à mon égard, rappela ma raison à l’ordre pour ne pas succomber à ce danger qui me guettait. Ses doigts serrèrent ma joue, comme crispés. J’ouvris les yeux, retirai ma main de son écrin captivant, elle poussa un soupir.
« Mic, doucement…
- Oui, je sais… J’y retourne
- Non »
« Mais si, ma douce, je m’en retourne de ce pas » pensai je sans lui dire. J’écartai ses doigts loin de moi, repoussant son second affront, la maintenant à sa place de temps de mon périple.
Ma seconde marche repassa près du bouton. Je pris sur moi pour ne pas le rejoindre comme dans notre dernière course folle. C’était un peu de ses rondes de nymphes que Dionysos saoule de musique et de vins pour les voir perdre la raison. Il me fallut être fort et raisonnable pour ne pas succomber à cette ivresse.
Mon chemin continua donc vers l’inconnu. J’écartai les plis pesants et chaud, croisa une fente. J’estimai sa longueur en avançant un peu plus le bras. Pour l’instant, elle semblait calme mais j’eus comme le pressentiment que quelque chose allait se passer. Deux plis plus minces cachaient l’entrée de ce monde miniature, du bout des doigts, encore et toujours. L’air ambiant semblait chaud et parfumé, lourd et chargé d’arômes. J’entrepris de ne plus y aller en aveugle : rien ne semblait dangereux dans cet univers apparemment hostile mais si accueillant malgré tout. Mon visage caressa les premiers fourrés, je ressentis la rose m’appeler. Je la vis enfin. Elle était d’un rouge sanguin, brillante et semblait délicieuse. Je la frôlai de ma bouche, elle eut un premier sursaut, je la caressai du bout de ma langue pour la goûter. Et la danse reprit comme la première fois de notre dernière rencontre…
Coralie serrait mes cheveux entre ses doigts, haletait sans réserve, rugissait presque d’un plaisir certain. Ses cuisses s’ouvraient sur mon passage, la fente m’attendait, rougeoyante et impatiente. Je déployais tout mon vocabulaire pour satisfaire ce pays de plaisir et de sensualité, en coup de litotes et de synonymes divins. Mes mains serraient ses cuisses pour ne pas être prisonnier de cet étau de sensualité. Elles s’ouvraient à mes avances sans trop de résistance. Je parcourai sa féminité de long en large, à coups de langue, à laper tous ces sucs qui venaient à ma bouche… J’enfonçai doucement un doigt dans le précipice qui s’offrait à moi. Il y glissait sans à-coup. Les parois tièdes l’entouraient, l’accompagnaient dans son exploration profonde. Mais je voyais bien que tout ça ne suffisait pas.
Alors de toute ma fierté de mâle de mon espèce, le membre tendu et conquérant, je me présentai à l’entrée toute tremblante. Je n’eus pas à forcer, les portes quittèrent leur scellé de virginité dans un mouvement naturel et tant désiré. Une goutte de sang tacha ton innocence, belle Coralie.
Elle pressait ma chair, tendait ses pieds jusqu’à la plante, accueillait ma fougue en petits cris sifflants entre ses dents parfois serrées. Elle caressait tout mon dos, griffait mon torse, emprisonna mes hanches de ses bras, me fit danser au rythme de son cœur battant. Je l’embrassai, la léchai de tout son long, revenant à son ventre, ses seins, sa gorge, ses lèvres, ses yeux.
Ouverts mais ailleurs, j’aperçus ce bleu profond qui flottait au milieu d’une pupille dilatée. Elle regardait dans le vague, je ne saurai l’y joindre, je ne croisais jamais son regard. J’aurai pourtant tant voulu savoir tout ce qui la bouleversait à cet instant. Ces cils vacillaient à mes coups de reins, son souffle rythmait nos ébats de jeunes premiers.
Encore. Encore. Encore et toujours. J’allais, venais, allais, venais, encore et encore. Une fièvre montait en moi, plus brûlante que celle de l’absinthe, plus incontrôlable qu’une transe de cigarette aux herbes fantomatiques. Je la sentais laisser sa trace de mon cœur à plus bas, toujours plus bas, consumant mes veines, immolant mon être. Arrivée à tout ce qui me faisait homme, ce plaisir incandescent voulut jaillir hors de moi. Je ne pus le retenir. Un râle accompagna ma délivrance, Coralie poussa un murmure ligoté d’autant de fougue.
Je ne pus tenir plus longtemps et m’allongea près d’elle, tremblante. Je voyais son ventre se lever à chacune de ses respirations, ses seins fermes et fiers se dresser face au ciel. Ma tête se lova près de son cœur, mon oreille sur sa peau, et mon corps tout le long du sien. De ma main droite, je la frôlai doucement. Mes paupières trop lourdes se refermèrent sur ce trésor, sur mon amour. Le sommeil m’étourdit un instant, je tirai la couverture qui n’avait pas survécu à nos ébats et qui s’était cachée à nos pieds. Elle s’endormit avec moi, paisiblement. Je ne pensais pas que les plus beaux trésors pouvaient être si près et si bien cachés. Le matin arriva en délivrance.
Ecrit par crevettebleue, le Dimanche 19 Septembre 2004, 21:41 dans la rubrique les écrits l'emportent.
Commentaires :
merci
C gentil, j'espere que ça plaira au jury...
verdicte en octobre pour la fete du livre!
bisous collants!
Estelle
verdicte en octobre pour la fete du livre!
bisous collants!
Estelle
Re: merci
Et bien en tous cas, si j'en étais, ce serait déjà vote acquis ;o)
Bises Estelle :o)
je file dormir, je me lève dans 5h30 :D
Hylst
Une superbe nouvelle que tu as écris là Crevette.
Un travail remarquable, une poésie, une prose, des sensations si bien exprimées qu'on les effleureraient presques...
Un plaisir certain que de lire des quelques paragraphes ponctués d'émotions.
Bises effleurées